AMÉRIQUE DU SUD / BRÉSIL
Pêche aux crustacés
Ce photo-reportage décrit la pêche au aratu pratiquée par les femmes dans les mangroves du nord-est brésilien
Beatriz Mesquita Pedrosa Ferreira (mesquitabia@hotmail.com), chercheuse, Fondation Joaquim Nabuco, Brésil, et membre de l’ICSF
L’aratu (Goniopsiscruentata) est un petit crustacé de couleur rougeâtre qui vit sur les branches des mangroves. Après préparation, il est vendu, et sa chair délicate en fait un met de choix.
Cette pêche est pratiquée essentiellement par des femmes qui y trouvent une source de revenu, ce qui leur permet de se débrouiller sans être dans un emploi classique et de bénéficier d’une certaine liberté dans leur vie.
Contrairement au crabe, l’aratu a une croissance rapide ; mais ces deux espèces ont du pour et du contre. « Si l’aratugrandissaitcomme un crabe, il n’y enaurait pas beaucoupàramasserparcequ’il y a beaucoup de mondeàle rechercher. C’estune chance qu’il se reproduitvite. Avec le crabe, ily a moins de t
AMÉRIQUE DU SUD / BRÉSIL
Pêche aux crustacés
Ce photo-reportage décrit la pêche au aratu pratiquée par les femmes dans les mangroves du nord-est brésilien
Beatriz Mesquita Pedrosa Ferreira (mesquitabia@hotmail.com), chercheuse, Fondation Joaquim Nabuco, Brésil, et membre de l’ICSF
L’aratu (Goniopsiscruentata) est un petit crustacé de couleur rougeâtre qui vit sur les branches des mangroves. Après préparation, il est vendu, et sa chair délicate en fait un met de choix.
Cette pêche est pratiquée essentiellement par des femmes qui y trouvent une source de revenu, ce qui leur permet de se débrouiller sans être dans un emploi classique et de bénéficier d’une certaine liberté dans leur vie.
Contrairement au crabe, l’aratu a une croissance rapide ; mais ces deux espèces ont du pour et du contre. « Si l’aratugrandissaitcomme un crabe, il n’y enaurait pas beaucoupàramasserparcequ’il y a beaucoup de mondeàle rechercher. C’estune chance qu’il se reproduitvite. Avec le crabe, ily a moins de travail et il rapporte plus. L’aratudoit subir une préparation avant que sa chair ne soit vendue ; ce n’est pas le cas pour les crabes ».
L’aratu se déplace rapidement, et il faut rester immobile et avoir de la patience pour le capturer. Il se déplace suivant la marée. Pour le saisir, la pêcheuse doit posséder une connaissance intime du lieu et des marées. Cette pêche nécessite un certain savoir. Pour réussir, il faut pouvoir rester pratiquement immobile et repérer le bon endroit dans la mangrove. Il serait vain de tenter sa chance dans un endroit déjà exploré. Les femmes commencent donc par bien inspecter les lieux pour y repérer les marques d’un passage récent. Elles entrent ensuite dans le lagon et se déplacent en cercle en prospectant. S’il y a des hommes dans les parages, elles vont habituellement chercher ailleurs.
Ce photo-reportage montre la façon de vivre des récolteuses d’aratu et leurs procédés de préparation. Les femmes que l’on voit ici sont conduites par ElialdaAvelino, une responsable de la communauté de Puxim do Sul, qui est toujours accompagnée par deux ou trois autres personnes, membres de la famille ou voisines. Car la recherche d’aratu dans la mangrove ne se fait jamais en solo.
Le moteur a été acheté par la communauté il y a environ cinq ans. La durée du trajet a ainsi diminué et le territoire de prospection s’est agrandi. Les sorties sont plus rentables quand on est quatre à partager les frais de carburant.
Il faut du temps pour trouver l’endroit idéal : un coin de mangrove qui n’a pas encore été fouillé, en tout cas pas la nuit précédente ! Et on évite soigneusement les endroits où il y a des ruches d’abeilles. Le choix du site revient habituellement à la femme la plus expérimentée du groupe.
Pour entrer dans la mangrove, il faut du savoir-faire et beaucoup d’attention. On doit porter un habillement spécial pour se protéger des insectes, des chaussettes et chaussures spéciales pour faciliter la marche et l’équilibre sur les racines des palétuviers. On doit aussi effectuer une recherche méticuleuse pour décider du bon endroit.
Pourquoi pêcher l’aratu ?
« Le crabe rapporte plus d’argent, mais c’est un rude travail. Plus pour les hommes ! Le crabe bleu est plus léger, mais il n’apparaît que de temps en temps. L’aratu est là toute l’année, et ça convient pour les femmes. Les hommes ne l’aiment pas ; ils préfèrent leurs crabes ».
Pour attirer l’aratu, il vaut mieux être seule. Les femmes se dispersent donc au moment de la pêche. Les mouvements du corps humain font fuir la bête ; et certaines choses l’attirent, notamment un appât : de petits crabes appelés almofala (Aratuspisonii), l’écorce de certains arbres et divers bruits comme un sifflement. Beaucoup de femmes ont dit que, lorsqu’elles sont à cette activité en silence, elles ont l’impression que tous leurs problèmes disparaissent. L’immobilité indispensable pour attirer ces créatures semble apporter une paix intérieure chez les pêcheuses.
Il faut cinquante aratus pour obtenir une livre de produit transformé. La production quotidienne peut varier d’une livre à 2 kilos en hiver, et atteindre 8 kilos par jour au cours de la meilleure période qui se situe en été. Pour parvenir sur le lieu de pêche, il faut entre quatre et six heures.
Il faut encore plus de travail et de temps dans la séquence après capture. Les aratus sont cuits et la chair est séparée de la coquille. Cette occupation peut se prolonger tard dans la nuit ; car décortiquer un kilo d’aratu, cela peut prendre jusqu’à deux heures de temps.
Le prix du kilo de produit fini varie suivant l’époque de l’année. L’été, quand la production est élevée, il est de 20 réaux (5 dollars). Les restes de coquillage servent d’engrais ou d’aliment pour la volaille.
Les femmes disent que leurs récoltes diminuent. Au cours des vingt dernières années, bien qu’interdite par l’Accord de gestion de la Réserve extractiviste/Resex de Canavieiras, la pêche de nuit avec des lampes (pratiquée surtout pas des hommes) s’est développée.
L’auteure remercie toutes les pêcheuses et responsables qui ont ainsi ouvert leur monde, les gestionnaires de la Resex de Canavieiras, l’Amex (association mère de la Resex), toutes les femmes de la pêche de Puxim do Sul, représentées par ElialdaAvelino qui l’a accueillie dans son cadre de vie.
[Note : Les photos font partie du travail de recherche intituléPoliticalecology of crustaceanfishing in mangroves in northeastern Brazil, qui a été réalisé au cours des trois dernières années (2017-2020) par la Fondation Joaquim Nabuco dans les Aires marines protégées pour une utilisation durable (Resex) du Nord-Est du Brésil. Ce texte porte sur la Resex de Canavieiras, au sud de l’État de Bahia, Brésil].
Préparation du matériel. Cettepêcheestpratiquéeessentiellement par des femmes qui y trouventune source de revenu, ce qui leurpermet de se débrouiller sans être dans un emploiclassique et de bénéficierd’unecertaineliberté dans leur vie.
Préparation du matériel. Il faut du temps pour trouverl’endroitidéal : un coin de mangrove qui n’a pas encore étéfouillé, en tout cas pas la nuitprécédente !.
Pour entrer dans la mangrove, il faut du savoir-faire et beaucoup d’attention. On doit porter un habillementspécial pour se protéger des insectes, des chaussettes et chaussures spéciales pour faciliter la marche et l’équilibre sur les racines des palétuviers.
L’aratu se déplacerapidement, et il faut rester immobile et avoir de la patience pour le capturer. Il se déplacesuivant la marée. Pour le saisir, la pêcheuse doit posséderuneconnaissance intime du lieu et des marées.
Beaucoup de femmes ontdit que, lorsqu’ellessont à cetteactivitéen silence, ellesontl’impression que tousleursproblèmesdisparaissent. L’immobilité indispensable pour attirercescréaturessembleapporterunepaixintérieure chez les pêcheuses.
Ellesentrentensuite dans le lagon et se déplacenten cercle enprospectant. S’il y a des hommes dans les parages, ellesvonthabituellementchercherailleurs.
Il faut encore plus de travail et de temps dans la séquence après capture. Les aratussontcuits et la chair estséparée de la coquille. Cette occupation peut se prolonger tard dans la nuit ; car décortiquer un kilo d’aratu, celapeut prendre jusqu’à deux heures de temps.