Editorial
Sur des bases équitables
Depuis un certain temps, et surtout au cours de la dernière décennie, dans le cadre des directives visant à orienter les programmes de développement, on préconise de plus en plus une approche fondée sur les droits humains (économiques, sociaux, culturels, civiques et politiques), tels qu’ils s’expriment dans la législation internationale, notamment par le truchement des Nations unies et de ses diverses agences. Cela revient à dire que toutes les initiatives de développement devraient contribuer directement à l’application concrète des droits humains.
Le document préparé par le Secrétariat de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) sous le titre Considérations sociales concernant le secteur de la pêche artisanale (COFI/2007/6) est tout à fait pertinent et doit être pris en compte. Il souligne en effet l’importance des droits humains pour parvenir aux objectifs du développement social et à une gestion efficace de la ressource. Le développement des pêches fondées sur des droits doit tout autant promouvoir les droits humains, faire progresser les niveaux de vie, lutter contre la vulnérabilité et l’exclusion sociale dans les communautés de pêcheurs que...
Editorial
Sur des bases équitables
Depuis un certain temps, et surtout au cours de la dernière décennie, dans le cadre des directives visant à orienter les programmes de développement, on préconise de plus en plus une approche fondée sur les droits humains (économiques, sociaux, culturels, civiques et politiques), tels qu’ils s’expriment dans la législation internationale, notamment par le truchement des Nations unies et de ses diverses agences. Cela revient à dire que toutes les initiatives de développement devraient contribuer directement à l’application concrète des droits humains.
Le document préparé par le Secrétariat de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) sous le titre Considérations sociales concernant le secteur de la pêche artisanale (COFI/2007/6) est tout à fait pertinent et doit être pris en compte. Il souligne en effet l’importance des droits humains pour parvenir aux objectifs du développement social et à une gestion efficace de la ressource. Le développement des pêches fondées sur des droits doit tout autant promouvoir les droits humains, faire progresser les niveaux de vie, lutter contre la vulnérabilité et l’exclusion sociale dans les communautés de pêcheurs que d’améliorer les systèmes de gestion des ressources halieutiques. S’occuper uniquement de ce dernier aspect sans le replacer dans le contexte social et culturel des populations concernées et de la société en général peut conduire à des résultats bien médiocres.
Dans certaines parties du monde, notamment dans les pays du Sud, les populations de pêcheurs vivent souvent dans la pauvreté, ont fort peu accès aux services essentiels, et ne sont guère représentés dans les processus décisionnels. L’approche préconisée dans ce document est donc ici tout à fait logique et éminemment souhaitable.
Pour tendre à la fois vers les objectifs d’une pêche responsable et du développement social en s’inspirant des droits humains, ce document préconise de retenir les critères de lutte contre la pauvreté comme élément clé du processus décisionnel relatif à l’attribution des droits de pêche afin que cette répartition soit conforme à l’équité, notamment lorsqu’il s’agit de décider qui sera inclus et qui sera exclu. On note également dans ce texte que, conformément au Code de conduite pour une pêche responsable, les objectifs de gestion des pêches doivent tendre aussi à plus de justice sociale et économique.
Dans cette perspective de justice, de lutte contre la pauvreté, il est tout à fait approprié d’adopter diverses mesures de gestion, comme l’instauration d’une zone artisanale interdite aux chalutiers (mesure réclamée depuis longtemps par les petits pêcheurs artisans du Pérou, du Chili, de la Thaïlande, de l’Inde, de l’Indonésie...), surtout si ces mesures s’accompagnent d’autres éléments : sélectivité des engins de capture, utilisation de techniques demandeuses d’une forte main-d’oeuvre.
Dans cette même perspective, il faudra réexaminer la validité de politiques des pêches fondées sur des droits de propriété au bénéfice de certains individus ou certains groupes en excluant un grand nombre d’aut res pêcheurs. Parmi ces derniers, i l peut y avoir des propriétaires-embarqués, pêcheurs à temps plein ou à temps partiel, hommes et femmes, et d’autres aux moyens limités. Les organisations de pêcheurs et de communautés de pêcheurs du Chili, d’Afrique du Sud, du Canada, d’Islande, d’Australie notamment ont dénoncé les coûts sociaux exorbitants qui sont la conséquence de tels systèmes, lesquels bafouent bien souvent des droits humains essentiels.
Comme le fait remarquer Svein Jentoft (voir p. 30), on fera appel à un régime de pêche fondé sur des droits uniquement s’il a été clairement établi ce qui suit : « Non seulement en théorie mais aussi en pratique, non seulement en général mais aussi dans les situations spécifiques des populations de pêcheurs concernées, cette politique fondée sur des droits de propriété permettra réellement d’améliorer la situation des plus démunis ».
Les décideurs ont la charge de veiller à ce que le régime de gestion des pêches repose sur des principes de durabilité et d’équité conformément aux pratiques sociales et culturelles du lieu, et qu’il contribue au développement social des communautés de pêcheurs. Si on ne tient pas compte de ces principes, on risque d’échouer dans la marche vers les objectifs fixés.