Profil
Valoriser le poisson
Lovin Kobusingye est une femme entreprenante qui réussit dans son pays, et dont la voixporte pour influencer les politiques panafricaines des pêches
Nasser Kasozi (katifarms@yahoo.com) Kati Farms (U) Ltd, Ouganda
Lovin Kobusingye est une jeune personne bien connue qui fait commerce de poisson dans le district de Wakiso au centre de l’Ouganda. Depuis plus de huit ans, avec ses deux partenaires et un millier d’autres pisciculteurs, elle transforme et valorise le poisson. En même temps, elle ne cesse de faire pression sur le gouvernement pour qu’il appuie les femmes qui ont une entreprise via un cadre politique favorable permettant de protéger leurs activités dans le pays même et, à un plus haut niveau, à travers l’Afrique.
Lovin Kobusingye a toute une série de réussites à son actif. Elle est la directrice et co-fondatrice de Kati Farms (U) Ltd, une société active dans la transformation du poisson. Elle est aussi présidente de la WIFA (Association des femmes de la pêche et de l’aquaculture en Afrique de l’Est), où sont représentÃ
Profil
Valoriser le poisson
Lovin Kobusingye est une femme entreprenante qui réussit dans son pays, et dont la voixporte pour influencer les politiques panafricaines des pêches
Nasser Kasozi (katifarms@yahoo.com) Kati Farms (U) Ltd, Ouganda
Lovin Kobusingye est une jeune personne bien connue qui fait commerce de poisson dans le district de Wakiso au centre de l’Ouganda. Depuis plus de huit ans, avec ses deux partenaires et un millier d’autres pisciculteurs, elle transforme et valorise le poisson. En même temps, elle ne cesse de faire pression sur le gouvernement pour qu’il appuie les femmes qui ont une entreprise via un cadre politique favorable permettant de protéger leurs activités dans le pays même et, à un plus haut niveau, à travers l’Afrique.
Lovin Kobusingye a toute une série de réussites à son actif. Elle est la directrice et co-fondatrice de Kati Farms (U) Ltd, une société active dans la transformation du poisson. Elle est aussi présidente de la WIFA (Association des femmes de la pêche et de l’aquaculture en Afrique de l’Est), où sont représentés 10 pays : Ouganda, Kenya, Tanzanie, Rwanda, Burundi, Éthiopie, Érythrée, Somalie, Soudan du Sud, Soudan. Elle est présidente de l’UNWFO (Organisation nationale des femmes de la pêche de l’Ouganda), trésorière de l’AWFISHNET (Réseau des transformatrices et mareyeuses africaines). Co-créé par la Commission de l’Union africaine, ce réseau rassemble des femmes de tout le continent. L’une des plus grandes fiertés de LovinKobusingye a été de recevoir le prix de l’entrepreneur de l’agroalimentaire africain en 2012. Elle a également été appréciée conjointement par la Fondation Rabobank, la FAO (Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’aquaculture) et l’EMCR (Centre de recherche sur les marchés européens) en tant que meilleure innovatrice de l’année pour son produit phare : la saucisse à base de poisson d’élevage. Forte de ces succès, Lovin Kobusingye n’a jamais regardé en arrière.
Sa première aventure, Kati Farms, a pris forme lorsqu’elle tentait de mettre des pisciculteurs ougandais en contact avec de nouveaux débouchés. Après son diplôme universitaire, elle est d’abord employée comme administratrice par la Société coopérative des pisciculteurs qui ne comptait alors que 34 adhérents. Elle a mis en place des formations pour les aider à produire davantage de poisson. Très vite, il y a eu de l’amélioration dans les bassins, et il arrivait plus de poisson à la coopérative. Les éleveurs se plaignaient cependant qu’il n’y avait pas de débouchés pour leur poisson frais. Lovin s’est donc mise à prospecter ; elle a pris contact avec des ateliers de transformation en Ouganda. Mais personne ne semblait intéressé pour diverses raisons : petits volumes, mauvais goût, trop d’arêtes, irrégularité des apports de la part des petits producteurs. Les gérants de la coopérative n’avaient pas l’intention d’investir dans la transformation, tout en encourageant Lovin à lancer un projet dans ce domaine comme une seconde activité. Ce fut le début de Kati Farms. Installée à Wakiso, l’entreprise achète maintenant 15 tonnes de poisson frais chaque semaine auprès d’éleveurs du pays. Les produits élaborés sont écoulés sur le marché intérieur et à l’exportation, vers des États voisins d’Afrique de l’Est, du Sud et Centrale.
L’idée de Lovin était d’utiliser tout le poisson apporté par les éleveurs pour lancer un tout nouveau produit : des saucisses de poisson. Comme elle ne savait pas comment diriger une entreprise, ni confectionner une saucisse, il lui fallait évidemment améliorer ses compétences en matière de gestion et de production. Elle avait entendu parler d’une pépinière d’entreprises à l’UIRI (Institut ougandais de recherche industrielle) qui finançait, formait et hébergeait les projets de jeunes entrepreneurs. Le responsable Production de l’UIRI soutenait le projet de Lovin. Mais il fallait des capitaux pour financer le démarrage de l’entreprise. Pour les banques commerciales, l’aventure était trop risquée. Les seuls disposés à consentir un appui financier étaient les adhérents de la coopérative. Ils acceptaient de fournir la matière première à crédit, à être payés seulement à la fin de chaque semaine.
Actuellement, la coopérative, avec son programme de formation en cours et un débouché assuré créé par Kati Farms, compte 1 000 membres. En absorbant 15 tonnes par semaine, Kati Farms utilise 75 % de la production totale. La chair de poisson est transformée en 1,5 tonne de saucisse et autres produits dérivés : poissons entiers évidés réfrigérés, filets réfrigérés, samossas de poisson, pâté de poisson pour animaux de compagnie.
Les opérations font l’objet d’une gestion scientifique et hygiénique. Pour faire des saucisses, par exemple, le poisson venu des piscicultures est séparé en filets, parures et gras, et le tout coupé en petits morceaux. Filets et gras sont moulus séparément avec une grille de 3 mm. La mixture est ensuite mélangée avec de la glace pilée, des épices, des additifs, puis réfrigérée à +12°C. Elle est ensuite mise dans des boyaux de 26 à 28 mm de diamètre. Les saucisses sont liées puis tordues pour former des pièces individuelles, chacune pesant environ 50 g. Elles sont ensuite mises dans des sachets en plastique pour atteindre un poids au détail de 0,5 kg (10 pièces) et 1 kg (20 pièces). Ces sachets sont amenés à la température de -18°C, et pourront se conserver ainsi de 3 à 6 mois.
Lancée dans la pépinière d’entreprises de l’UIRI avec seulement 800 dollars d’économies, Kati Farmes vaut maintenant l’équivalent de 400 000 dollars, répartis entre trois investisseurs. L’atelier fournit un emploi direct à 38 personnes, et des emplois indirects à environ 500 autres, pour la distribution, la commercialisation, les ventes. Les résultats obtenus par LovinKobusingye sont une source d’inspiration pour les femmes de l’Ouganda, de l’Afrique et de partout ailleurs.