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SAMUDRA Report

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0973-113X
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mars
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2007
Mais toute cette beauté éclatante pâlit avec l’apparition, juste au-dessus de notre étrave, de la pleine lune, plus vaste et plus claire que je ne l’avais jamais vue....... — Extrait de Marcher sur l’eau : quatre jours sur l’horizon à bord d’une jangada, de Patrick Hefferman
Pérou
Pêche minotière
Poule aux oeufs d’or ou albatros ?
Derrière le succès apparent de l’industrie minotière péruvienne se cache une situation peu brillante : efficacité médiocre, coût environnemental et social élevé
Cet article a été écrit par Brian O’Riordan (briano@scarlet.be), Secrétaire du Bureau de l’ICSF à Bruxelles. Il est basé sur diverses sources, notamment Oannes (http://www.oannes.org.pe/), Patricia Majluf (http://www.conam.gob.pe/documentos/Ana lisis_ambiental/CEA%20Per%C3%BA%20-%20Evaluaci%C3%B3n%20Ambiental%20del%20Sector%20Pesquero.pdf.), Marcos Kisner Bueno : (http://pescasostenible.blogspot.com/) et Pesca y seguridad alimentaria (http://www.cooperaccion.org.pe/publicaciones2.php?id_publicacion=0087)
Après le boom des années 1960 puis le creux des années 1970, c’est à nouveau le boom dans la filière minotière de ce pays. Les chiffres préliminaires pour 2006 font apparaître que les recettes à l’exportation pour les produits de la pêche (farine et consommation humaine directe) ont atteint des niveaux historiques :1,761 milliard de dollars, soit une augmentation de 7,9 pour cent par rapport à 2005. Malgré une baisse de 30 pour cent, les farines de poisson restent le beau diamant sur la couronne dans ce domaine...
Pérou
Pêche minotière
Poule aux oeufs d’or ou albatros ?
Derrière le succès apparent de l’industrie minotière péruvienne se cache une situation peu brillante : efficacité médiocre, coût environnemental et social élevé
Cet article a été écrit par Brian O’Riordan (briano@scarlet.be), Secrétaire du Bureau de l’ICSF à Bruxelles. Il est basé sur diverses sources, notamment Oannes (http://www.oannes.org.pe/), Patricia Majluf (http://www.conam.gob.pe/documentos/Ana lisis_ambiental/CEA%20Per%C3%BA%20-%20Evaluaci%C3%B3n%20Ambiental%20del%20Sector%20Pesquero.pdf.), Marcos Kisner Bueno : (http://pescasostenible.blogspot.com/) et Pesca y seguridad alimentaria (http://www.cooperaccion.org.pe/publicaciones2.php?id_publicacion=0087)
Après le boom des années 1960 puis le creux des années 1970, c’est à nouveau le boom dans la filière minotière de ce pays. Les chiffres préliminaires pour 2006 font apparaître que les recettes à l’exportation pour les produits de la pêche (farine et consommation humaine directe) ont atteint des niveaux historiques :1,761 milliard de dollars, soit une augmentation de 7,9 pour cent par rapport à 2005. Malgré une baisse de 30 pour cent, les farines de poisson restent le beau diamant sur la couronne dans ce domaine des exportations. Les recettes d’exportation de farines pour 2006 sont estimées à 1,136 milliard de dollars, légèrement en retrait par rapport à 2005.
Cette belle devanture, ce succès apparent, a un coût énorme, non comptabilisé, et qui fait mal au Pérou. Le prélèvement annuel de 8 à10 millions de tonnes d’anchois (cet élément fondamental de la chaîne alimentaire dans le vaste système du courant de Humboldt) est en train d’homogénéiser la grande biodiversité des côtes péruviennes et de déstabiliser cet écosystème.
En 2006, une évaluation des pêches maritimes péruviennes faite à la demande de la Banque mondiale, décrit comme suit les pêcheries d’anchois de ce pays : « Il existe une surcapacité dans la flottille et la transformation ; l’efficacité est faible ; les pertes infligées à la rente sont importantes ; les coûts environnementaux et sociaux qui se répercutent sur l’Etat péruvien sont élevés ; les énormes recettes en devises profitent à une fraction minime du secteur de la pêche ».
Ce document souligne que le bilan apparemment favorable des exportations de farines ne prend pas en compte les aspects suivants :
• Les conséquences sur l’écosystème dans son ensemble, sur la chaîne alimentaire, la pérennité (et les possibilités de développement) des autres pêcheries, notamment dans le secteur artisanal ;
• Les conséquences de la production de farines de poisson sur l’environnement côtier en général (rejet des déchets dans la mer, impact sur l’air et les sols) et sur la santé des populations riveraines ;
• La répartition très déséquilibrée des profits : les Péruviens dans leur ensemble ne tirent pratiquement aucun avantage des recettes plutôt rondelettes de la filière, laquelle externalise lourdement ses coûts environnementaux et sociaux ;
• Le coût d’opportunité de la transformation de toute la production d’anchois en farines alors que la malnutrition et la pauvreté touchent entre 40 et 60 pour cent de la population.
Du 4 au 10 décembre 2006 s’est tenue à Lima la Semaine de l’anchois. Organisée par le CSA (Centre pour un environnement durable), une nouvelle structure basée à l’Université de Cayetano Heredia, cet événement s’adressait aux couches socio-économiques les plus élevées de la population. Il s’agissait de changer l’image de marque de l’anchois, tout juste bon pour la nourriture des animaux ou des pauvres, alors qu’il peut devenir un produit digne des gourmets, un produit de luxe. Il serait donc souhaitable d’encourager les investisseurs à proposer de l’anchois pour la consommation humaine directe. Durant cette semaine, on a aussi attiré l’attention sur les points suivants :
• Il faut assurer la durabilité des ressources halieutiques du Pérou ;
• Il faut assurer la viabilité des entreprises de pêche péruviennes ;
• Il ne faut pas laisser à la charge des générations futures les conséquences des opérations minotières d’aujourd’hui ;
• Les activités de pêche doivent à la fois produire des richesses, tendre vers le développement durable et lutter contre la malnutrition au Pérou.
Selon les organisateurs, tous ces objectifs peuvent être atteints « si on produit moins de farines avec l’anchois et qu’on en mange plus ».
Actuellement l’Etat perçoit seulement 1,15 dollar par tonne d’anchois débarquée, ce qui fait entre 9 et 12 millions de dollars annuellement sur la base des 8 à 10 millions de tonnes déclarées. Ces rentrées servent à couvrir les frais d’administration et de recherche pour la pêche. C’est une somme dérisoire comparé aux gains de l’ensemble de la filière minotière. On ne peut considérer cela comme un arrangement équitable.
Marcos Kisner, Péruvien et spécialiste des pêches, fait remarquer que pour obtenir une tonne de farines de poisson il faut environ 4,4 tonnes d’anchois, et qu’une tonne de farines exportée rapporte seulement un peu plus de 5 dollars à l’Etat.
Sur la base du prix moyen de la tonne pour 2006, soit 600 dollars, et du prix actuel qui est de 1400 dollars la tonne, on peut affirmer que la filière minotière péruvienne fait des profits exceptionnels.
Autrement dit, le gouvernement péruvien subit de ce fait un manque à gagner évident. Kisner estime que le secteur de la pêche, parce qu’il utilise des ressources naturelles d’une telle importance nationale et internationale, devrait contribuer au Trésor public proportionnellement à ses revenus.
En janvier 2007, la quatrième société minotière du Pérou, Copeinca, fait son entrée à la bourse d’Oslo, ce qui montre bien l’importance des gains privés. Copeinca possède 37 navires et 5 usines, et a déclaré un bénéfice brut s’élevant à 90 millions de dollars en 2006, affichant fièrement une marge opérationnelle de 40 pour cent ; c’est-à-dire que les recettes d’une seule société sont dix fois plus importantes que les rentrées annuelles du Trésor public en provenance du secteur de la pêche. Laisser quelques privilégiés gaspiller ainsi les richesses halieutiques du pays représente un coup d’opportunité considérable.
L’amélioration des équipements et infrastructures pour la capture, le débarquement, la transformation et la distribution du poisson afin de répondre à la demande des consommateurs nécessite d’énormes investissements. L’Etat ne peut donc se permettre ce manque à gagner massif en matière de rentrées fiscales, d’autant plus qu’il doit aussi faire face aux coûts de gestion et de régulation des pêcheries, de la formation, de la recherche et du développement, de la lutte contre la pêche illicite.
Comme dans le passé
Du point de vue de la durabilité de la ressource, la filière minotière péruvienne est aujourd’hui confrontée aux mêmes problèmes, et peut-être aux mêmes conséquences, qu’en 1971, l’année du grand boom de la pêche, juste avant sa déroute spectaculaire. La flottille de pêche possède des capacités de capture quatre ou cinq fois supérieures aux stocks d’anchois disponibles en année d’abondance (lorsque ne se produit pas le phénomène ENSO). En une seule journée, elle peut prélever plus de 100 000 tonnes, et donc consommer le quota annuel en trois ou quatre mois.
Les usines de transformation ont une capacité de 146 millions de tonnes, c’est-à-dire vingt fois le quota de capture autorisé en année d’abondance. Cette surcapacité est à l’origine d’une concurrence féroce pour le poisson et la matière première à transformer. Elle pousse aussi à minimiser les volumes produits dans les déclarations, à faire du braconnage (notamment dans la zone des 5 milles en principe réservée pour les bateaux artisans et pour la préservation de la ressource), à prélever des espèces officiellement destinées à la consommation humaine (maquereau, chinchard...) pour faire des farines.
En extrayant de si grandes quantités d’anchois, on prive d’autres espèces de poissons d’importance commerciale, les oiseaux qui produisent du guano et les mammifères marins de leur principale source de nourriture. Patricia Majluf, directrice du CSA, à qui a été décerné en 2005 le Whitley Gold Award pour son action en faveur de la protection de la nature, fait remarquer qu’une si grande extraction de biomasse finit par mettre en danger la résilience de l’écosystème (c’est-à-dire sa capacité à résister aux pressions et à récupérer) dans lequel les stocks d’anchois font fonction d’amortisseur.
Une étude récente portant sur les débarquements de poisson frais du secteur artisanal au Pérou, commandée par le Collectif international d’appui aux travailleurs de la pêche (ICSF), attire l’attention sur un aspect proche : l’homogénéisation de l’écosystème pour ce qui concerne les populations de poisson et les conséquences que cela peut avoir sur les moyens d’existence et la sécurité alimentaire des populations côtières.
Ce rapport met en évidence deux tendances principales. Premièrement, les statistiques ont été manipulées pour montrer que les débarquements de poisson frais suivent le rythme de la croissance démographique. Si l’on écarte ces manipulations, il apparaît que les débarquements de poisson frais ont chuté de 40 % au cours de la période 1998-2004. Mais au fil de la dernière décennie, le nombre des pêcheurs artisans qui débarquent du poisson frais a pratiquement doublé : entre 30 000 et 50 000 en 1996, entre 80 000 et 100 000 actuellement. Le recensement effectué en 1996 comptabilisait 6 200 bateaux de pêche artisans tandis que celui de 2005 montre que leur nombre est passé à 9 090.
Les statistiques officielles disent que, en 2004, environ 40 pour cent des débarquements de poisson frais, soit 150 000 tonnes, venait « d’autres » ports (c’est-à-dire inconnus), tandis que les captures en provenance de ports connus étaient passées de 250 000 tonnes environ en 1997 à 200 000 tonnes en 2002.
Ce rapport affirme qu’une grande partie du poisson venant de ports inconnus représente en fait des importations. Il précise également que, en 2004, environ 25 % des captures étaient constituées de pota, pour employer l’appellation locale, c’est-à-dire l’encornet rouge.
En 1998, cette espèce occupait une place insignifiante. Aujourd’hui le pota constitue une part majeure de la production artisanale (et industrielle), mais à cause de sa faible valeur unitaire et des problèmes techniques de transformation, les revenus des pêcheurs ont baissé. Le pota a presque entièrement remplacé le merlu dans la composition des débarquements. Le merlu, pour qui l’anchois constitue une part essentielle de son alimentation, a fait l’objet d’une pression de pêche intense.
Majluf estime que « même s’il n’existe pas de preuves concluantes que nous sommes en train de surexploiter l’anchois, il est certain que nous sommes en train de surexploiter l’écosystème. Mais cela ne veut pas dire que nous devons arrêter cette filière. Ce qu’il faut c’est replacer sa gestion dans une perspective élargie. Nous savons depuis longtemps que la surpêche sur l’anchois provoque la chute d’autres espèces. Mais lorsque nous interrogeons l’IMARPE (Institut de la mer du Pérou), on nous répond qu’ils ont étudié chaque espèce, mais séparément. Ils ne prennent pas en compte les interactions au sein de l’écosystème ».
La pollution
Pendant ce temps, contrairement à d’autres secteurs industriels, aucune réglementation environnementale vraiment efficace ne s’applique à la filière minotière. Les usines qui produisent les farines ne sont tenues par aucune limite en ce qui concerne le rejet de leurs effluents solides, liquides ou gazeux.
Dans un article publié par le journal péruvien El Commercio, Nelly Luna Amancio décrit les fonds marins autour de Chimbote, qui est le premier centre minotier du pays. C’est une zone morte, couverte de sédiments sur une épaisseur de plus d’un mètre, et l’air est un mélange toxique de vapeurs et de gaz sulfureux. A Chimbote, 24 usines de transformation du poisson en farines déversent des rejets liquides alors que seulement certaines sont autorisés à le faire par la Direction générale de la santé environnementale (DIGESA).
La transformation de telles quantités de poissons en farines soulève aussi des questions importantes en matière d’équité et de justice sociale. D’un côté l’abondance de ressources et l’accumulation de richesses privées, de l’autre 15 millions de personnes (plus de la moitié de la population du pays) vivant dans des conditions de grande pauvreté et ne parvenant pas à faire face à leurs besoins essentiels, pour la nourriture, la santé, la scolarisation, l’habillement, le logement. Selon l’Unesco, un petit Péruvien sur quatre âgé de moins de cinq ans souffre de malnutrition.
Gastón Acurio, cuisinier péruvien de renommée internationale (et l’un des organisateurs de la campagne Semaine de l’anchois) affirme que, si 10 pour cent des captures de poisson destiné à la production de farines servait plutôt à des programmes alimentaires massifs et bien ciblés, on pourrait réduire de moitié le taux de malnutrition du Pérou. D’une certaine façon, le modèle suivi actuellement par la pêche péruvienne conduit à dénier à 10 millions de Péruviens le droit à une alimentation correcte.
Ceci dit, comme l’explique Marcos Kisner, « personne ne suggère que les 8 millions de tonnes d’anchois doivent obligatoirement entrer dans l’alimentation humaine directe, ou que cela va remplacer le cebiche au bar. Nous avons surtout besoin d’une politique nationale qui permette aux enfants d’avoir une alimentation saine et suffisante pour bien grandir. Autre raison pour rester sceptique : personne n’a envie de remplacer les filets de poisson blanc par de l’anchois. Il y a des enfants qui n’aiment pas le lait ou une autre nourriture. Et leurs mères sont obligées de les forcer à consommer ces produits parce qu’ils sont indispensables dans la nourriture : c’est la même chose pour l’anchois. Il faut proposer de l’anchois aux consommateurs sous diverses formes et à prix réduit. Les mères doivent habituer leurs enfants à en consommer. En encourageant la consommation d’anchois, elles créent les conditions d’un bon développement physique. C’est cette catégorie de consommateurs (enfants, femmes enceintes) qui doit être la cible prioritaire. Ceux qui peuvent, ceux qui sont déjà adultes, qu’ils continuent à consommer d’autres espèces de poisson et qu’ils prennent goût aussi à manger des anchois ! D’après les documents historiques, il semble que, avant la conquête espagnole, la production, le séchage et le commerce de l’anchois pour la consommation humaine étaient bien organisés. Les Incas avaient des transports réguliers d’anchois vers les hauts plateaux pour en faire bénéficier la population. »
Le nouveau gouvernement péruvien a déclaré la guerre contre la malnutrition, et retenu comme élément de sa stratégie le développement de la consommation d’anchois par le plus grand nombre. Aux termes du Décret suprême 002-2007, le Programme national d’aide alimentaire du Ministère des femmes et du développement social doit désormais consacrer au moins 8 pour cent de son budget à l’achat de produits dérivés de l’anchois et du pota. Le Ministère de la production et l’Institut des technologies de la pêche doivent collaborer avec les ministères de la défense, de l’intérieur, de la santé, de l’emploi et des femmes pour élaborer des programmes visant à encourager la production et la diffusion de produits à base d’anchois. Ceux-ci seront distribués via divers ministères pour entrer dans l’alimentation de la police, des forces armées et des couches les plus pauvres de la population.
Le Pérou a récemment signé un accord avec le Japon (Agence japonaise de coopération internationale) pour le « développement d’une pêche responsable de l’anchois destiné à la consommation humaine directe ». Pour compléter ces programmes d’aide alimentaire publique, le secteur privé sera aussi étroitement associé à cette action dans les opérations de capture, transformation et commercialisation de l’anchois pour la consommation humaine directe.
Une bonne affaire
La commercialisation de produits à base d’anchois pour la consommation humaine directe peut se révéler intéressante sur le plan national et aussi international. L’anchois péruvien en conserve se fait une place sur de nombreux marchés étrangers, en particulier en Afrique où il existe une forte demande pour des produits à la fois bon marché et nourrissants.
Selon Alfonso Miranda Eyzaguirre, Vice-ministre des pêches, il n’y avait pratiquement pas en 2000 de débarquements d’anchois destinés à la consommation humaine directe. En 2006, il y a eu plus de 50 000 tonnes. La valeur des exportations de conserves d’anchois a atteint 847 millions de dollars en 2005. Les principales destinations sont la Colombie (202 800 $), l’Italie (190 000 $), l’Angola (174 400 $), le Zaïre (81 700 $).
La Semaine de l’anchois a démontré que, avec de l’imagination, un marketing professionnel, des campagnes promotionnelles, l’anchois pourrait devenir un produit de luxe au Pérou, aussi populaire chez les yuppies que le Pisco Sour (cocktail local). Au cours de la Semaine de l’anchois, on trouvait de l’anchois frais dans les supermarchés de Lima entre 0,5 et 1 dollar le kilo, et cette marchandise a vite été vendue. En tout, environ 18 000 personnes ont goûté à l’anchois dans les 30 restaurants participants. Sur les 600 clients interrogés dans ces lieux, 95 pour cent ont aimé ce qu’ils avaient consommé et seraient prêts à recommencer.
Mais réorienter la flottille péruvienne pour produire de l’anchois et autres espèces en vue d’une consommation humaine directe, établir les infrastructures nécessaires et apporter un soutien économique visant à développer la consommation de poisson, tout cela présente de nombreuses difficultés. Tout d’abord, comment s’y prendre pour restructurer et rationaliser la filière minotière ?
Actuellement, le débat sur les surcapacités porte essentiellement sur les moyens de réduire les capacités de capture de la flottille. Il est question d’instaurer un système de quotas individuels, comme le propose la SNP (Société nationale de pêche), d’installer des cales réfrigérées pour réduire de moitié ou d’un tiers les capacités des navires, d’améliorer la qualité du produit fini, de procéder à des rachats de navires, d’appliquer des plans de reconversion ciblée (se tourner par exemple vers la pêche au maquereau et au chinchard pour la consommation humaine directe).
Mais le plus gros problème, comme l’a fait remarquer Kisner, est peut-être que la pêche péruvienne patauge dans les eaux de l’indécision politique. Si ce secteur économique se trouve aujourd’hui dans une situation pitoyable, c’est à cause de l’absence de politique à long terme fondée sur une approche écosystémique, accompagnée d’une réforme structurelle technologique, le tout géré par des décideurs capables de fournir un leadership et de résister aux tentations qui viennent avec le pouvoir.
Force est de conclure que la pêche à l’anchois destiné à approvisionner l’industrie minotière péruvienne ressemble plus un albatros qu’à la poule aux oeufs d’or.